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John Lurie, connu du public comme acteur, notamment depuis sa participation aux films Down by Law et Stranger than Paradise de Jim Jarmusch, a également eu un succès dépassant les milieux underground new-yorkais comme saxophoniste et leader du groupe de jazz-punk The Lounge Lizards. On lui doit également la musique d’une vingtaine de films et la réalisation d’une série de télévision créée dans les années 1990, Fishing with John. Parallèlement, John Lurie développe depuis le début de sa carrière une activité de peintre, de dessinateur et d’illustrateur, même si celle-ci est restée confidentielle jusqu’à une date récente. On retrouve dans ses oeuvres picturales la même esthétique singulière que dans sa musique : une grande spontanéité et un goût pour la provocation. Ses dessins et ses aquarelles sont souvent retravaillés au pastel à l’huile et à la mine de plomb et donnent un aperçu sur un monde atypique marqué par une grande liberté d’esprit. Leur insolence ainsi que leur sens particulier de la couleur, jouant souvent délibérément le mauvais ton, créent une complexité visuelle qui fait écho à la richesse acoustique de sa musique. Considérant ses oeuvres comme des « tests Rorschach élargis », Lurie commence chacune de celles-ci de manière aussi intuitive que possible, pour imaginer, « lorsque l’oeuvre est aux trois quarts achevée », un titre lui donnant un tournant inattendu, à la manière d’une caricature. L’humour caustique, absurde et dadaïste ainsi que les allusions sexuelles laconiques cachent souvent des considérations sur la condition humaine, conférant à l’oeuvre picturale de John Lurie un aspect dramatique. Comme le décrit le poète et écrivain Glenn O’Brian, les oeuvres de John Lurie évoluent dans un monde à part entière : « Le meilleur art, art visionnaire, te prend par le col et te traîne dans un autre monde, un monde étrange que tu n’as jamais vu auparavant. Peut-être y a-t-il des points communs avec notre monde. Peut-être que tu reconnais certaines choses. Mais tu sais que ce n’est plus le Kansas. »