Fernando Sánchez Castillo
Fernando Sánchez Castillo (1970) s’intéresse à la place que la révolution et l’agitation sociales occupent dans l’art et la société, en leur reconnaissant une valeur utopique et esthétique. Empreinte de l’ironie de la décontextualisation, l’inscription détache en lettres flamboyantes sa fonction commémorative déjà dépassée. Si « nous sommes tous des indésirables » rameutait les étudiants de mai 68 sous un même slogan, le sens est réapproprié ici par un artiste qui se gausse de la solennité en lui préférant grandement la spontanéité d’une fête populaire. Et quoi de plus gai que l’ouverture de cet Eldorado magnifique où l’art a officiellement le droit d’être l’un des derniers bastions de la vérité ? Cette vérité toujours politiquement incorrecte, mais néanmoins scrutée, décortiquée et passée au crible par maints artistes et curateurs, les « indésirables » d’aujourd’hui.
Avec Bird Feeder (2010) Sánchez Castillo propose une approche moins acerbe, pleine d’humour et d’insolence. Il présente le buste du roi d’Espagne Philippe V, qui fut de 1700 à 1712 Duc de Luxembourg et en détourne sa véritable fonction de monument de commémoration. Par un mécanisme intérieur ingénieux, à l’aide d’une vis d’Archimède qui déploie en continu des graines dans un creux situé sur le vertex du buste, « Bird Feeder » promeut la relation particulière qu’ont les oiseaux avec la statuaire publique. Ceux-ci viennent s’y (re)poser et se nourrir, parfondant la patine du bronze et contribuant à la fertilisation des jardins des alentours.